20 janvier 2009

Expropriations au quartier d'Arménie : Le maire fait le ménage à Clamart

La municipalité a un projet de construction de logements sociaux dans ce quartier (rue des Monts et rue de Verdun). Bonne idée ! Ce quartier n’est pas encore très pourvu en logements sociaux et il nous a toujours paru important d’équilibrer les quartiers en favorisant la mixité sociale.

Il se trouve qu'un terrain public (rue des Monts) de plus de 3000 m² permettrait de mettre en œuvre ce projet. Cependant, pour une raison incompréhensible, le maire s'obstine à vouloir exproprier deux pavillons qui sont en limite de ce terrain, ainsi qu'un autre en bordure intérieure, pour former un parfait quadrilatère. Au regard du projet immobilier vaguement évoqué, on ne voit pas du tout pourquoi la destruction de ces trois pavillons serait nécessaire à la réalisation de l'opération. En effet, la municipalité n'annonce que la construction de 20 logements ce qui est très peu compte tenu de la surface déjà disponible* et l'argument du maire, qui consiste à dire que ces deux pavillons en restant là remettraient en cause la cohérence du projet, paraît donc pour le moins discutable (très...).

* Cette zone est classée UB, c'est-à-dire qu'elle a un Coefficient d'Occupation du Sol élevé. De plus, les constructions sociales bénéficient d'un bonus de COS de 20 % et, si la construction répond à des critères écologiques édictés dans le cahier des charges de la mairie, elle bénéficiera de 20 % de bonus de COS supplémentaires.

Deuxième argument du maire, l’un des pavillons est frappé d’alignement. Il se trouve que cet alignement date de 1942 (peut-être pour faire passer les chars sous l’occupation ?) et qu'il a été maintenu depuis selon la vague idée qu’il pourrait y avoir un jour un tramway qui passerait par là ! Un projet risqué quand on sait que les carrières souterraines ont déjà provoqué d'importants effondrements dans cette zone (le dernier en 1961). De plus, si l'on réalisait la totalité des alignements de Clamart, il faudrait raser la moitié de la ville : de nombreux alignement existent encore et ne seront très probablement jamais réalisés (heureusement).

Dernier argument, qui serait presque drôle si la situation n’était pas aussi tragique, le projet (qui rappelons-le n'a jamais été réellement présenté) prévoit que les logements devront se situer en front de rue. Pourquoi ? Et bien d'après le maire parce que "ça se fait partout comme ça !" (faut-il y voir une inspiration du style architectural de Philippe Pemezec au Plessis Robinson ?). Pourtant, lorsqu'on habite en ville, on constate très souvent que les logements en retrait par rapport à la rue sont bien plus agréables à vivre que ceux qui donnent directement sur les voies de circulation, surtout si d'aventure un tramway finit par passer sous vos fenêtres... Mais le maire insiste, il veut un projet "propre" ! De là à imaginer qu'il va nettoyer tout ça au Karcher, il n'y a pas loin et l'expression elle-même en dit long ! L'aménagement urbain est pourtant un domaine dans lequel on constate régulièrement que les projets les plus ingénieux et les plus reconnus sont ceux qui ont obligé les architectes à répondre à des contraintes particulières et à faire preuve d'invention.

Il est regrettable qu'une mairie (spécialement quand elle se prétend de gauche) attache aussi peu d'importance au drame que peut représenter l'expropriation de 2 àxxxxx 3 familles. Des familles qui vivent depuis près de 40 ans dans un quartier où elles ont élevé leurs enfants et établi des relations de voisinage assorties d’une certaine solidarité sociale. Hélas, lors du dernier conseil municipal (décembre 2008), le projet d'enquête publique sur ce périmètre a été voté sans états d'âme par les conseillers municipaux de la majorité, à une ou deux abstentions près (quelques conseillers encore fidèles à leur convictions mais qui n'ont tout de même pas osé voter contre le projet du chef suprême).

À l'autre bout de ce quartier, rue de Verdun, une deuxième opération du même ordre est également envisagée (avec moins de drames humains car les plus grands terrains ne sont pas lotis). Pourtant, d'un point de vue urbanistique, ces deux opérations de grande ampleur sur une surface aussi réduite sont discutables. En effet, ce quartier mérite le détour, et si ce n'est pas à proprement parler un « beau quartier », il fait preuve d'originalité et possède un certain cachet. Il s'agit, en effet, d'un ensemble de petits pavillons à l'origine modeste séparés par des sentes, où les déplacements ne peuvent se faire qu'à pied. A l'heure où nous parlons d’éco-quartier à Clamart, vouloir faire disparaître un tel patrimoine est pour le moins paradoxal. Sur le plan historique ce type d'urbanisation se fait de plus en plus rare et il est dommage qu'aujourd'hui on ne prenne pas en compte cet aspect. N'oublions pas que, même s'il ne s'agit pas d'œuvres architecturales majeures, ce style est représentatif d'une époque et d'un mode de vie (bientôt ?) révolus.