Zone de Texte:  Dites, c'est quoi, l’économie Solidaire ?

Quelques questions à Dominique Meier

(conseiller municipal délégué à l'économie sociale et solidaire)

« Le grand risque est que les gens croient qu’il y a création de richesses là où il n’y a qu’enrichissement. La rémunération du capital n’est pas un gain pour la collectivité, quand elle ne correspond pas à une production de biens ou services supplémentaires. Ce n’est qu’un mécanisme de pillage sophistiqué. »

Guy Hascoët (Ancien secrétaire d'Etat à l'économie solidaire)

«Les richesses des 350 habitants les plus riches de la terre sont égales à la «richesse» (ou la misère ?) des deux milliards trois cents millions des habitants les plus pauvres. Le système monétaire archaïque et périmé continue à régner en faisant des ravages dans l’humanité.»

François Terris (Responsable sel)

Comme nous sommes consciencieuses, pour la préparation de notre interview, nous avons été voir la définition que donne le site internet du ministère de l'économie :

« L’économie solidaire désigne toute une série d’activités et de services présentant des caractéristiques d’utilité collective unanimement reconnues mais pour lesquelles les conditions de solvabilisation ne sont pas réunies, ce qui fait obstacle à la qualité des prestations. Le chantier des règles de solvabilisation est à ouvrir pour que ces activités nouvelles puissent s’installer durablement partout en France et concerner tous les citoyens. »

- Nous : Ou la la, quesaquo ?

- D. Meier : « Faire de l'économie solidaire, c'est penser l'économie autrement, comme une activité humaine qui a pour objet de faire du lien entre les hommes, d'améliorer notre vie en développant les services que l'économie dite libérale ne propose pas car ils ne sont pas "rentables" selon ses règles. C'est estimer que le profit social a autant d'importance, voire plus, que le profit financier. Son objectif est de nous faire progresser vers une société plus humaine. C’est une forme de solidarité qui nous extraie du principe de "charité" par le fait qu’elle parie sur l’avenir et qu'elle est surtout beaucoup plus dynamique et valorisante, car tous ses participants ont un rôle actif. »

Par exemple?

« Si on ouvre une crèche privée ou municipale, on est un prestataire de service; si on crée une crèche parentale où chacun des parents donne un peu de son temps à la garde collective des enfants, on fait de l’économie solidaire.

Si l’on ouvre un restaurant, on fait du commerce, mais si ce restaurant devient un lieu de rencontre culturel où les gens de tous milieux peuvent venir manger, ou que chacun participe financièrement à hauteur de ses moyens au prix du repas afin que les moins favorisé puissent partager cette table, là on fait de l’économie solidaire.

Quand on fait des échanges de compétences plutôt que de les monnayer, on fait de l’économie solidaire. »

- Nous : Mais çà, c'est le SEL (système d'échange local), çà existe déjà sur Clamart?

- D. Meier : « Oui, beaucoup d’associations de Clamart et d’ailleurs font de l’économie solidaire, parfois sans le savoir ! »

- Nous : Mais est-ce que le cadre associatif ne risque pas d'être un peu contraignant pour ceux qui veulent faire de l'économie solidaire?

- D. Meier : « C'est justement pour cela qu'une loi a créé un nouveau statut en 2001 : la S.C.I.C. (société coopérative d'intérêt collectif). Ce statut reprend certains aspects des associations (représentativité de la direction, responsabilité collective, pas de paiement de l'impôt sur les sociétés), mais il permet en plus d'avoir une pluralité de financements et de partenaires, qui peuvent ainsi être de natures très diverses (privés, collectivités, etc.) »

- Nous : Mais si c'est tellement  intéressant, est-ce que toutes les entreprises n'auront pas envie d'adopter ce statut?

- D. Meier : « Non, parce que ce statut interdit aussi tout enrichissement personnel : les membres sont rétribués selon leur activité, il ne peut pas y avoir d'actionnaire ni de cotation en bourse. Il peut y avoir des profits, mais à condition qu'ils soient réinvestis dans l'action collective. En bref , l'économie solidaire, c’est enfin une économie qui donne du sens collectif, plutôt que de parler bénéfice, elle nous dit solidarité et lien social. Il s’agit de favoriser et promouvoir les projets d’entreprises solidaires, coopératives, mutuelles… et de développer des réseaux d’entraide. »

- Nous : Alors qu’attendons-nous ? Faisons plus d'économie solidaire, çà a l’air bien !

- D. Meier : « La difficulté réside dans la méthode de développement de cette économie car pour exister elle doit s’appuyer sur un tissu social solide et volontaire. C'est à chaque citoyen de s'investir et de proposer, elle ne peut pas être le résultat d'une politique venue d'en haut, car elle doit avant tout répondre aux préoccupations et aux attentes de chacun. Les institutions (mairie, etc.) ne sont là que pour aider ensuite à la mise en œuvre de ces projets. »

- Nous : En somme, l'économie solidaire ne peut se développer que s'il y a une démocratie locale vivante?

- D. Meier : « Exactement! Pour que germent les idées et que naisse l’élan, il est important que les habitants des quartiers se connaissent, et qu’ils aient analysé ensemble leurs problèmes, ensuite ils peuvent proposer des projets au délégué à l’économie solidaire, qui pourra alors envisager d'offrir un soutien logistique pour leur réalisation (accompagnement de projet, élaboration des statuts, implantation géographique…). »

- Nous : Mais l'économie solidaire n'a-t-elle des applications qu'au plan local, ou a-t-elle des implications plus larges?

- D. Meier : « L'économie solidaire n'a pas de frontières, car dans le monde d'aujourd'hui ce que nous faisons à notre petite échelle se répercute sur le reste de la planète. Par exemple, quand on fait du « commerce équitable », c’est-à-dire que les produits que l’on achète ont été payés aux artisans ou aux agriculteurs du tiers monde à un prix qui leur permet de vivre décemment en économisant sur les coûts intermédiaires, on fait de l’économie solidaire. Il faut aussi favoriser une économie respectueuse de l'environnement, afin de préserver la qualité de vie de nos descendants, car là est la véritable richesse. Au niveau de la mairie, on peut ainsi intervenir au niveau du service d'achat pour favoriser les fournisseurs (et les filières) qui s’engagent sur ces normes sociales et environnementales, mais cela demande beaucoup de temps. »

- Nous : Merci de nous avoir ouvert l’espoir d’un monde nouveau !

Si vous avez des projets d'action solidaire, vous pouvez joindre Dominique Meier sur R.V. : tél. 01.55.95.84.00; e-mail : dominique.meier@wanadoo.fr.

CB et VV